OWNI http://owni.fr News, Augmented Tue, 17 Sep 2013 12:04:49 +0000 http://wordpress.org/?v=2.9.2 fr hourly 1 C’est pas du jeu http://owni.fr/2012/06/07/la-culture-des-jeux-video-est-aux-fraises/ http://owni.fr/2012/06/07/la-culture-des-jeux-video-est-aux-fraises/#comments Thu, 07 Jun 2012 20:27:10 +0000 Anaïs Richardin http://owni.fr/?p=112808 gamification a eu lieu mardi 5 juin à Paris, chez Microsoft. L'occasion de constater à quel point cette notion, associée à des pratiques culturelles, vit en France une forme de préhistoire à déroulement lent. Très lent. ]]>

“Gaïmifiqueïchone”, “gaymificassion” ou même “gammificassion”, ce jour-là, les intervenants alternent les prononciations. Le plus simple serait d’utiliser “ludification”, le terme français consacré, mais tous préfèrent y aller de leur touche personnelle. Mardi 5 juin, dans la salle de conférence du 41 quai Roosevelt à Paris, 150 personnes assistent à la première conférence française sur la gamification – c’est-à-dire l’application des mécaniques du jeu à d’autres domaines.

Organisé par le site d’information Services Mobiles dans l’énorme bâtiment de verre et d’acier de Microsoft France, l’évènement n’a pas attiré les foules. Un public peu nombreux qui reflète la faible avancée de la France sur le sujet. Tout comme la difficulté à prononcer le terme gamification symptôme d’une non-appropriation du phénomène.

Terminologie à succès outre-Atlantique, elle commence tout juste à être susurrée à nos oreilles, généralement pour l’associer à une recette miracle à l’usage des publicitaires, journalistes, chefs d’entreprise, enseignants, médecins, formateurs, enfants… Mais il ne suffit pas de vouloir surfer sur la vague de la gamification pour obtenir un résultat probant comme l’a magistralement démontré la conférence Paris Gamification Day“.

Car certains intervenants semblaient tout aussi novices que leur audience, ne maitrisant ni l’art oratoire ni le sujet de la gamification. Sans compter les exemples présentés qui relèvent plus de la badgification, pointification, ou autre concept en -ification, que de la gamification à part entière.

Comme ce fut le cas pour Rypple,  un système, présenté par Olivier Nguyen Van Tan, qui permet de récompenser avec un badge un collègue ou un employé pour la qualité du travail accompli. Ici, point de gamification mais plutôt une badgification qui se rapprocherait du cas du site de François Bayrou, présenté à la conférence par son concepteur, Matthieu Lamarre.

Matthieu Lamarre et Vincent Puren

Dans ces deux exemples, les utilisateurs reçoivent des badges pour leurs actions. Dans un cas, cela repose sur l’appréciation d’un utilisateur, dans l’autre sur une auto-déclaration de réalisation de la mission. Et dans les deux cas, la récompense s’arrête à un badge. Or un simple badge n’est pas une motivation extrinsèque suffisante pour développer la motivation intrinsèque à réaliser une action, comme l’a expliqué Olivier Mauco, game designer et chercheur, lors de son intervention :

Les badges n’ont de valeur que relative. Ça notifie où est-ce que l’on est par rapport à sa progression et ça permet aussi de se positionner face à l’espace social. Si on regarde bien d’où ça vient, ces mécaniques-là ne sont pas forcément dans les jeux mais plutôt sur les market places et sur les Xbox live etc. donc on n’est pas encore vraiment au cœur du jeu vidéo. Si vous faites un dispositif de gamification sans réellement offrir quelque chose d’autre que les badges ça peut poser problème dans l’engagement.

Si la gamification est utile aujourd’hui c’est pour sa faculté à développer de l’engagement. Les badges n’étant pas suffisants pour capter l’attention de l’utilisateur sur le long terme (ex. de Foursquare, qu’on utilise intensivement au début et qu’on oublie ensuite, pour ne plus l’utiliser que sporadiquement), certaines entreprises offrent des récompenses en adéquation avec les besoins et les désirs des utilisateurs. C’est le cas de Babble Planet, présenté par le novice mais néanmoins très à l’aise Eugène Ernoult. Disponible à partir de septembre 2012, cette application permettra aux enfants entre 8 et 11 ans d’apprendre l’anglais et d’évoluer dans le jeu tout en améliorant leur prononciation, et en se confrontant à des joueurs du monde entier. Les phases de recherche sont actuellement en cours pour déterminer quelles récompenses seraient les plus adaptées à cette catégorie d’utilisateurs.

Divergence

Mot à la mode ou coquille vide pour certains, mouvement majeur et lame de fond pour d’autres. Les différents camps s’affrontent sur la gamification. Et c’est cette divergence d’opinions qu’on espérait voir dans cette salle Grand Bleu de Microsoft. Mais plutôt que de traiter du sujet en profondeur, majorité des intervenants sont restés à la surface. C’est de la confrontation que naissent les idées les plus intéressantes et les tables rondes tenaient ici plus de l’auto-promotion que du débat. Le public a ainsi pu découvrir des jeux comme Kompany, un advergame créé par OUAT Entertainment et Scanbucks, une application censée rendre le shopping plus ludique.

De nombreux jeux, qui utilisent la gamification à bon escient, comme Ludomedic, ont récemment vu le jour en France, et le choix des exemples présentés n’était certainement pas des plus judicieux. Pourquoi avoir choisi une application comme Scanbucks, qui incite les gens à scanner les codes barres de produits de marques pour obtenir des points, convertibles en gains ? Où se trouve la fameuse “couche de ludique” ? Qu’y a-t’il d’intéressant à parcourir les rayons à la recherche du dernier nettoyant pour sol co-brandé ? Si ce n’est pour obtenir 5 points, convertibles en une carte cadeau de 10 euros que vous obtiendrez dans un délai minimal de deux ans, sur simple présentation des 2500 points nécessaires.

Vanessa Lalo, Benjamin Thomas et Rémi Sussan

Puisque la conférence était censée être didactique, il est regrettable que certaines interventions n’aient pas été plus complètes. Comme celle de Vanessa Lalo, psychologue clinicienne spécialisée dans les médias numériques, qui était parfois bien dépourvue face à la teneur des questions de Benjamin Thomas, l’organisateur de l’événement, et qui a laissé l’audience sur sa faim. Prenant part à la dernière table ronde avec le journaliste Rémi Sussan, (Internet Actu, plutôt calé sur le sujet) ses réponses hésitantes n’ont guère éclairé le public. Un gâchis lorsqu’on lit ses articles fouillés sur les jeux vidéo et les médias numériques.

La conférence avait pourtant bien débuté : état des lieux du secteur du jeu vidéo par Julien Villedieu, délegué général du Syndicat national du jeu vidéo (SNJV) et présentation de la gamification par Olivier Mauco, qui maitrise son sujet. En France, le marché du jeu vidéo représente 1,7 milliards d’euros de chiffre d’affaire annuel, devançant l’industrie cinématographique. Face aux lieux communs que la majorité de la population partage sur les jeux vidéo, cette première intervention de Julien Villedieu a redéfini la typologie du joueur moyen. Fini le nerd boutonneux asocial, qui, les doigts crispés sur sa souris et son clavier, passe ses journées à jouer. Aujourd’hui le joueur est majoritairement une joueuse qui utilise son mobile. Le jeu vidéo est sorti de son périmètre habituel et c’est cette évolution qui permet aujourd’hui de capitaliser sur le potentiel énorme de la gamification.


Photos au mobile par Anaïs Richardin

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L’usager, cet autre concepteur http://owni.fr/2011/07/22/l%e2%80%99usager-cet-autre-concepteur/ http://owni.fr/2011/07/22/l%e2%80%99usager-cet-autre-concepteur/#comments Fri, 22 Jul 2011 13:47:04 +0000 Ingi Brown http://owni.fr/?p=74397 Partout les mêmes recommandations : il faut trouver ou retrouver une place pour l’usager dans le processus de conception. Ces recommandations, reprises en cœur, ont au moins le mérite de nous faire réfléchir aux notions qu’elles viennent articuler, et nous permettent de questionner les termes usage, concepteur, utilisateur que nous manipulons peut-être trop par habitude. Car finalement qui est-il, cet usager ?

Des outils de personnalisation toujours plus sophistiqués

Tout d’abord il me semble que deux idées bien différentes se cachent derrière ce terme d’usager concepteur. Une première chercherait à défendre l’idée que pour obtenir de meilleurs produits, un usager (ou plus souvent un ensemble d’usagers) doit retrouver une place dans le processus de conception. L’objectif avoué est de concevoir un produit adapté à un futur usager consommateur, celui-ci est donc pris pour sa capacité à prescrire.

La question qui en découle est celle de la place de cet usager prescripteur dans le collectif qui participe à la genèse de l’objet. Tour à tour le marketing, les designers, les sociologues de l’usage, ou dans certains cas les ingénieurs revendiquent une expertise propre sur les usages. Ainsi les uns et les autres débattent de la place et des activités à donner à ces usagers que l’on mobilise, de l’organisation de « tests de concept » en amont du développement, à la validation des prototypes par des « panels test » d’utilisateurs.

Mais alors qu’apparaissent une nouvelle génération d’usagers bidouilleurs qui modifient, réparent [en] et recombinent les produits qu’ils achètent, certaines entreprises vont plus loin et proposent une autre voie en développant des outils de personnalisation toujours plus sophistiqués (par exemple NikeID qui permet de personnaliser chaque détail d’une paire de chaussures, mais aussi Shapeways [en] qui propose des objets numériques reconfigurables à modifier soi-même avant de lancer une impression 3D à la commande). Il semblerait que l’ère de la conception des biens par des entreprises soit révolue, et que l’usager aujourd’hui devient le principal, voire l’unique concepteur des objets qu’il désire.

Génération bidouille

Ces deux voies reposent pourtant sur une proposition quelque peu problématique. Elles supposent que l’on puisse tenir une séparation fondamentale entre le processus de conception d’un objet et une certaine activité subséquente que l’on nommerait usage ou « utilisation » par un usager utilisateur. Ici, la séparation concepteur/usager parait être avant tout un modèle trop simpliste de séparation de leurs activités : le concepteur conçoit puis livre le produit à un utilisateur qui utilise. Or il nous semble qu’on ne puisse pas assumer une telle position, mais qu’au contraire, l’usager est toujours, et a toujours été, l’un des concepteurs de l’objet.

Le dernier des concepteurs

Prenons un exemple contemporain d’un produit complexe : le Vélib’. Objet hybride, ni vélo, ni transport en commun, le Vélib’ prend quelques attributs des deux pour en faire un produit nouveau et inattendu. De plus, son intégration dans l’espace public génère des contraintes fortes à prendre en compte, et multiplie de fait le nombre et la diversité des acteurs qui composent l’équipe conceptrice. Ainsi le Vélib’ est issu d’un processus de conception qui a intégré tous les grands experts de la conception : non seulement les ingénieurs de chez JC Decaux et le designer Patrick Jouin, mais aussi des juristes, des informaticiens, des experts d’autres entreprises (Orange, Bouygues Telecom), et organisations (urbanistes de la Ville de Paris, conseillers politiques).

Et vélo devint banc public !

Et pourtant, bien qu’il en résulte un objet que l’on pourrait qualifier d’ultra-conçu, sa mise à disposition à un ensemble d’utilisateurs a généré une multiplicité de surprises : la selle, seul élément « personnalisable » du vélo, devient vecteur de communication communautaire sur l’état du vélo (selle retournée = vélo en mauvais état). Les vélos stationnés, devant les laveries de quartier par exemple, deviennent « banc » public individuel pour lire au soleil.

Usages détournés ? Pas seulement : même dans l’usage le plus attendu, le produit prend des dimensions surprenantes. Le passage d’un modèle simple de citadin qui s’empare d’un vélo public pour se déplacer (scénario prédéfini à la conception) à la « mise en usage » dans les mains des premiers utilisateurs développe des usages bien plus complexes que l’on ne pouvait imaginer. Il ne s’agit pas seulement de se déplacer : prendre un Vélib’ c’est se montrer, c’est appartenir à une communauté, c’est afficher des valeurs, un statut. Les exemples ne manquent pas pour montrer le décalage, l’inventivité, la créativité, ou nous dirons plus formellement, la capacité à concevoir des usagers, de façon entièrement indépendante de la firme et de ses processus.

Un second exemple peut éclairer cette thèse de l’usage concepteur : en Afrique, c’est un collectif d’usagers à l’échelle d’un pays qui va transformer le téléphone portable et son système de cartes prépayées en une forme nouvelle de transactions financières. Les minutes de communication sont utilisées comme substitut à l’argent liquide, car elles peuvent être envoyées par de longues distances (il suffit d’envoyer un numéro par SMS) et peuvent être conservées de manière plus sécurisée (les « minutes » ne se voient pas, à la différence d’une liasse de billets). Ici les utilisateurs ne conçoivent pas seulement un détournement profond de l’usage préconçu, mais conçoivent en plus un collectif et une organisation, avec les règles nécessaires au développement de cette activité nouvelle.

L’usage, poursuite de la conception

De ces deux modèles s’illustre bien l’impossibilité de séparer formellement une activité d’usage et une activité de conception d’un objet. L’usage est une poursuite de la conception. Certes, les exemples montrent des extrêmes, mais il nous semble qu’au-delà de l’usage détourné singulier, tout usage peut être lu comme une activité de conception à part entière. On pourrait aller plus loin et défendre l’idée qu’un usager conçoit non seulement son propre usage, mais aussi sa propre interprétation, ainsi que le projet d’utilisation de tout objet qu’il utilise. Ainsi le marteau du menuisier n’est pas le même que le marteau équivalent mis dans les mains du bricoleur du dimanche, et qui est lui-même différent du marteau, pourtant objectivement identique que l’on pourrait exposer dans un musée.

Ainsi l’objet décontextualisé n’est rien. C’est l’usager, seul ou en collectif, qui le concrétise au moment de son utilisation. Pour ainsi dire, l’usager conçoit a minima le tout de l’objet, c’est-à-dire son projet, son interprétation et son usage propre. L’activité d’utilisation, ou l’usage, est une activité conceptrice, au même titre que celle effectuée par les autres acteurs intervenant dans la genèse de l’objet. L’usager, c’est l’ultime concepteur sans qui l’objet n’aurait pas d’existence propre.

Les nouveaux emblèmes de la modernité : des objets à potentiel d’usages

Le couteau suisse est l’archétype du produit multi-fonction, celui qui s’adapte à des besoins divers. A l’origine de sa conception, un certain nombre de scénarios d’usages prédéfinis servent de guide pour le choix des différents modules : lames, loupes, scies, ciseaux, auquel on ajoutera par la suite des fonctionnalités nouvelles. Ainsi l’évolution des usages va faire apparaître tour à tour un briquet, pointeur laser, ou une clé USB. Mais on perçoit rapidement la limite de ce raisonnement : faut-il intégrer un téléphone portable ? Un GPS ? Une carte de paiement ? Un appareil photo ? Quels sont les nouveaux usages auxquels il faut s’adapter ? On peut même se demander si paradoxalement le nouveau couteau suisse ne doit pas aussi intégrer un module « pansement » pour venir en aide à celui qui s’en sert mal ! « Un iPad ? Mais… ça sert à quoi ? Tu l’as acheté pour quoi faire ? » « Écoute je ne sais pas trop, on verra, mais ça avait l’air intéressant. »

Couteau suisse ou iPad ?

À l’opposé du couteau suisse multi-fonctionnel, on retrouve aujourd’hui des objets tels que l’iPad, produit sans fonction prédéfinie ou prédominante. En revanche l’usager vient le « configurer » en le transformant pour l’adapter à des usages qu’il conçoit. De la même sorte, Twitter a pris son envol dès lors que des usagers ont commencé à expérimenter avec le nouveau service de « micro-blog » ou « maxi-sms ». Les inclassables deviennent intrigants et séduisent par le potentiel de nouveaux usages qu’ils permettent aux utilisateurs.

Ainsi apparaît une classe nouvelle d’objets qui séduisent sans usages préconçus, qui mettent en avant non pas leur « adaptabilité », au sens du couteau suisse, mais plutôt leur potentiel d’usage. Ils offrent de nouvelles capacités de conception aux usagers et en ce sens, on peut les qualifier d’outils.

On peut donc se poser la question de cette « nouvelle ère de l’usager concepteur » : en effet, ce qui fait la nouveauté n’est pas tant que l’usager devient un concepteur, nous avons montré en quoi il l’a toujours été, en revanche il semble qu’aujourd’hui cet usager souhaite aller plus loin dans sa capacité à imaginer de nouveaux usages. Ce ne sont plus des objets multifonctions qui inévitablement vont figer un certain nombre d’usages prescrits à partir de scénarios prédéfinis, mais de véritables plateformes de conception, des produits qui permettent à tous d’imaginer et concevoir des usages inédits. Quant aux tentatives, aujourd’hui, d’implication des usagers dans les organisations conceptrices, il nous semble qu’il faut maintenant penser ces médiations en levant l’hypothèse des usages donnés et prescripteurs et en considérant plutôt celle que nous avons présentée ici d’usages conçus. Au-delà d’une interaction concepteur/usager, c’est à présent des objets qui font de l’usager un meilleur concepteur qu’il faut développer ; car comme l’a évoqué Bernard Stiegler :

« Le destinataire de l’objet industriel de demain est un praticien, et non un usager »

Cliquer ici pour voir la vidéo.

Pour aller plus loin :

> Stiegler Bernard, Du Design comme sculpture sociale – Nouvelle association dans les desseins du design in Brigitte Flamand (collectif), Le Design : Essai sur des théories et des pratiques , Éditions du Regard, 2006.
> Les travaux de recherche de Kin Wai Michael Siu [en] à la Hong Kong Polytechnic University School of Design sur le parallèle entre l’interprétation des objets et les théories du « reader-response ».

Billet initialement publié sur Strabic.fr, gentiment signalé par Tj, un lecteur.

Illustrations : © Vincent Godeau | collectif Le Bureau sauf Velib Flickr CC PaternitéPas d'utilisation commercialePartage selon les Conditions Initiales Martin Tod

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[Webdocu] Les seniors connectés, une espèce en voie d’apparition http://owni.fr/2011/06/12/80-ans-connectes-webdocu-les-seniors-connectes-une-espece-en-voie-dapparition/ http://owni.fr/2011/06/12/80-ans-connectes-webdocu-les-seniors-connectes-une-espece-en-voie-dapparition/#comments Sun, 12 Jun 2011 18:25:48 +0000 Admin http://owni.fr/?p=67502 L’ensemble des études démographiques le démontre: la France vieillit. En 2050, près d’un français sur trois aura plus de 60 ans. Il y a fort à parier que les “digital natives” développeront des usages différents des personnes âgées d’aujourd’hui. Celles-ci font figure de pionniers, et c’est à elles que s’attache le webdocumentaire 80 ans, connectés, dont les équipes techniques d’OWNI ont assuré le développement.

A travers trois portraits touchants, Marine de Saint Seine et Igal Kohen partent à la rencontre de ces “seniors” connectés. Gisèle, Antoine, Marcel et Bophany font un usage différent d’Internet, mais l’utilisation du réseau leur permet de lutter contre l’ennui et l’oisiveté, et de garder contact avec leur famille. Le sociologue Serge Guérin suggère quant à lui que l’usage des nouvelles technologies aurait un impact positif sur la prévention du vieillissement: “plus les gens ont de liens sociaux, plus ils font fonctionner leur cerveau”.

Au cours de ces trois vidéos rythmées par la musique de l’excellent Chapelier Fou, on fait la connaissance d’individus découvrant les joies de la sérendipité, de l’échange de photos, des chats via Facebook ou Skype, de l’iPad ou encore des soirées passées au fond du lit en compagnie de séries américaines en streaming. La démonstration est faite que, comme le dit Gisèle, 87 ans: “on peut très bien apprivoiser la bête”.

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Ressources numériques : des trésors derrière des forteresses http://owni.fr/2011/04/20/ressources-numeriques-des-tresors-derriere-des-forteresses/ http://owni.fr/2011/04/20/ressources-numeriques-des-tresors-derriere-des-forteresses/#comments Wed, 20 Apr 2011 10:26:43 +0000 Bibliobsession http://owni.fr/?p=58020
Je suis frappé par l’énergie considérable requise pour la gestion des “ressources numériques” dans les bibliothèques publiques. Attention je ne parle pas ici des bibliothèques universitaires où la problématique est différente.

À l’attention des non-bibliothécaires qui lisent ce blog, il s’agit de contenus payants, payés par les bibliothécaires pour leurs usagers qui sont a minima identifiés comme adhérents de la bibliothèque.

Nous pensons avec des mots : là où les bibliothécaires ont des “ressources numériques” le reste du monde a le web et des contenus…

C’est bien pour ça, soit dit en passant, qu’il ne s’agit pas de “valoriser des ressources numériques” (via des brochures imprimées “attractives”) mais plutôt de répondre à tel ou tel besoin documentaire (par ex. que recommandez vous pour apprendre l’anglais ?)

Un vrai far-west fatigant et des résultats décevants

De fait, ces “ressources numériques” sont un vrai far-west qui oblige les bibliothèques à d’incroyables acrobaties de gestion pour des résultats très décevants. Le bibliothécaire est censé tous les jours rendre séduisants des trésors derrière les murs de forteresses…

Pourquoi est-ce un domaine aussi complexe à gérer pour nous ? Parce que ces offres (chères) de contenus ne sont absolument pas pensées pour les destinataires finaux et oublient quasi systématiquement les droits fondamentaux des usagers en faisant une croix sur l’ADN du web : l’accès libre, le streaming et l’interopérabilité.

Vous en doutez ? Vous vous dites que j’exagère ? Voici un point proposé par Annie Brigant, de la direction des Bibliothèques de la Ville de Grenoble (merci à elle). Ces informations ont été proposées dans le cadre d’une réunion sur le sujet des “ressources numériques”. Extraits :

La bibliothèque municipale de Grenoble propose une offre :

  • sur place : Pressens, le Kompass, Vodeclic, la Cité de la Musique (désormais disponible au conservatoire) les films documentaires de la BPI,
  • à distance : Numilog, ArteVod, Cairn sur le portail Lectura et le patrimoine numérisé.

Sur le plan des usages, on observe :

  • la faiblesse chronique, la stagnation voire la baisse des usages. Pour plusieurs ressources, les usages sur place sont difficiles à mesurer en raison de l’insuffisance du modèle statistique d’Ermès.
  • En 2010, 8500 articles ont été consultés sur Pressens, il y a eu 200 téléchargements sur Numilog. Les livres audio de Numilog se sont révélés décevants en raison d’un problème de format (pas de mp3).
  • ArteVod pose le problème du paiement à l’acte : pour garder la maîtrise de leur budget, les bibliothèques doivent mettre en place des quotas qui détournent les usagers de la ressource et provoquent une baisse des usages.

Pour expliquer cette faiblesse des usages, on pointe souvent une insuffisance de communication, de formation des équipes, et surtout de médiation vis-à-vis des usagers. Il n’en demeure pas moins que des difficultés réelles viennent compliquer le travail de valorisation des équipes, qui se heurtent à la complexité du sujet. Ces difficultés sont liées :

  • aux modalités d’usage : ressource disponible sur place / à distance, en streaming / en téléchargement (les deux possibilités étant parfois offertes) ;
  • aux modalités d’identification : accès anonyme pour la consultation sur place, inscription préalable au service ou non pour les ressources à distance (ArteVOD et Numilog, mais pas CAIRN) ;
  • aux modalités d’accès : l’accès peut être illimité (éventuellement dans la limite d’un nombre d’accès simultanés) ou restreint, mais avec divers types de restrictions : limitation du nombre de consultations à un instant T (Numilog), du nombre de consultations sur une période (ArteVOD), durée de consultation limitée (Numilog sur place) ;
  • aux supports de consultation : ex. les livres numériques sont lisibles sur un micro-ordinateur mais aussi sur un type de tablette de lecture (Sony Reader), l’iPad et l’iPhone à condition de récupérer l’application sur l’Applestore ; les livres audio sont accessibles en WMA sur les baladeurs compatibles avec ce format, etc. ;
  • aux DRM : limitation du nombre d’accès sur X supports de consultation (Numilog), limitation du nombre de pages imprimables (variable selon le document sur Numilog) ;
  • aux contraintes techniques : la possibilité d’accéder au service varie selon l’ordinateur (PC/Mac), le système d’exploitation (Windows/Linux), le player (Adobe Digital Editions et non Adobe Reader pour Numilog, Windows media Player 11 pour ArteVOD), la version du navigateur, etc.
  • aux contenus eux-mêmes : ex. la durée d’archivage varie selon les titres de presse sur Pressens.

Que doivent en outre savoir les équipes pour pouvoir renseigner les usagers ? Il leur faut connaître :

  • les ressources acquises en bouquets et celles pour lesquelles la bibliothèque a opéré une sélection dans un choix de titres,
  • les modalités d’acquisition : abonnement (Kompass), acquisition (Numilog), acquisition pour une durée limitée (CineVOD),
  • le type de limitation d’accès : nombre d’accès simultanés (Vodeclic), nombre d’usagers (CinéVOD), nombre de documents (Pressens : restriction de 10.000 articles sur un an, avec limitation du nombre d’articles consultables par session), forfait annuel de téléchargement (ArteVOD),
  • les modalités d’identification : pour les ressources sur place, il y a un délai de 24 heures après inscription, d’où l’utilisation de cartes collectives en attendant.

Toutes ces contraintes font de l’utilisation des ressources numériques – notamment à distance – un véritable parcours du combattant pour les usagers dont seuls les plus motivés vont au bout de la démarche.

Avec un peu de recul, la situation actuelle revient à acheter pour d’autres des accès rares pour des contenus “naturellement” cachés derrière des murs payants, qu’on s’épuise ensuite à valoriser. “Le web” a compris depuis bien longtemps que le meilleur moyen de “valoriser” (faire connaître) des contenus est de laisser l’accès libre quitte à vendre des services ensuite (= freemium). Faire le contraire a des conséquences lourdes : difficulté d’accès à un monde clos, hétérogène, exclusif à certains moyens techniques et sélectionnés par un bibliothécaire inconnu (là où sur le web la confiance se construit, bien au-delà du statut de bibliothécaire)…

Entrer dans des flux, hétérogènes et instables, mais riches et ouverts

Pourquoi cette situation s’est-elle développée ? Je pense que nous sommes victimes du tropisme propre à la profession : la constitution de collections dans l’univers numérique. Aujourd’hui, le bibliothécaire est celui qui “donne accès” à des bases comme on achète un livre. Il fournit un accès légitimé par ses soins au risque de confondre la valeur marchande de l’achat au nom de la collectivité avec la vraie valeur d’usage : celle du libre accès, de la circulation et de l’appropriation des contenus par le plus grand nombre. Il me semble que, trop souvent, au nom de l’idée séduisante et rassurante d’une collection, pour “donner accès à”, nous acceptons des restrictions d’usages insupportables pour bon nombre d’internautes ! Le résultat est éclatant : partout on constate que ces offres ne “marchent pas” et coûtent très cher.

Dans les flux, j’ai de plus en plus de mal à croire à cette notion de collection et de plus en plus tendance à croire que la recommandation fine et la propulsion valent sélection, font collection. C’est bien là le changement de paradigme le plus profond pour des bibliothécaires qui doivent, pour le numérique, abandonner l’idée de mondes clos, de collections cohérentes, de communautés stables et territoriales pour entrer dans des flux nécessairement hétérogènes et instables, mais riches et ouverts.

Alors que faire ? Qu’on ne m’oppose pas svp l’instabilité des modèles économiques des fournisseurs de ces contenus. Rien n’oblige les acheteurs publics que nous sommes à accepter les conditions de prestataires qui cherchent à séduire leur clientèle à eux : les bibliothécaires. L’enjeu est bien d’élaborer avec eux des offres dans lesquelles l’usager final est respecté, dans lesquelles les bibliothécaires trouvent leur place le tout avec un modèle d’affaires viable. C’est possible si on s’en donne la peine. Nous avons quelques outils de mutualisation pour ça qui restent j’en conviens largement à améliorer. Nous avons très clairement besoin de les renforcer, nous y travaillons activement.

Dire non aux offres qui ne respectent pas à minima les droits des usagers ?

Toute la gestion des “ressources numériques” absorbe un temps de travail, des compétences, des énergies précieuses qui de fait, ne sont pas consacrées à la médiation de contenus en accès libre très souvent reléguée dans des sélections de sites hors des flux de passage…

Ne rêvons pas, la situation restera hétérogène, je n’ai bien sûr pas de solution ultime à vous proposer. Mais trouvons des réponses en posant des questions fondamentales : faut-il, pour les “ressources numériques”, continuer à construire des mondes clos au risque d’oublier la médiation de l’océan infini des pépites de contenus en accès libres sur le web ? Les contenus payants et payés pour d’autres, si intéressants nous semblent-ils, pour lesquels nous dépensons autant d’énergie, valent-ils vraiment la peine d’être proposés derrière des forteresses ? Ne faut-il pas tout simplement arrêter de proposer des offres qui n’ont pas des caractéristiques minimales respectueuses des droits des usagers ? A-t-on forcément besoin de “donner accès à” pour recommander, pour propulser ? Comment repenser ces équilibres ?

Au moment où l’on déclare les droits des lecteurs de livres numériques, où les amateurs de films s’engagent à ne plus pirater en échange d’offres acceptables, n’est-il pas temps de se regrouper et de proposer une charte de l’usager des ressources numérique en bibliothèque ?

Billet initialement publié sur Bibliobsession

Images PaternitéPas d'utilisation commercialePartage selon les Conditions Initiales Fr Antunes et PaternitéPas d'utilisation commerciale Shakespearesmonkey

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La mort de l’e-mail : et après ? http://owni.fr/2011/04/13/la-mort-de-l%e2%80%99e-mail-et-apres/ http://owni.fr/2011/04/13/la-mort-de-l%e2%80%99e-mail-et-apres/#comments Wed, 13 Apr 2011 10:30:22 +0000 Damien Douani http://owni.fr/?p=56644 J’ai animé la semaine dernière une conférence en ligne dénommée “L’e-mail est mort : quelle alternative ?” (que vous pouvez revoir ici dans l’onglet Webinar) avec des témoignages très pertinents de l’IREPS et de la Lyonnaise des Eaux. Cela m’a amené à me pencher sur la question et à identifier des éléments concrets sur un ressenti partagé par tous, à savoir que l’e-mail est devenu un poids dans l’activité professionnelle de chacun.

Les jeunes maîtrisent la communication (surtout par SMS)

Citons un chantre des nouveaux médias, Mark Zuckerberg, 27 ans cette année : « Les jeunes n’utilisent plus l’e-mail, ils préfèrent les SMS. Les gens veulent des choses plus immédiates comme le SMS ou le tchat pour échanger entre eux. »

Si l’on jette un coup d’œil aux statistiques issues de comScore, cela semble corroborer ces dires :

Rien de bien nouveau sous le soleil… Quiconque a un ado près de lui sait que lui demander son e-mail revient à lui parler d’un outil du siècle dernier (c’est techniquement le cas). Rien ne remplace le bref message instantané électronique comme fondation de l’échange interpersonnel.

En fait, l’e-mail est, comme la structure sémantique du mot l’indique, une version électronique du courrier papier classique, avec sa boite aux lettres, son enveloppe, sa « copie carbone » (cc)… Seule innovation : la copie cachée (cci), le tout croisé avec la logique de classement arborescent des ordinateurs des années 80.

Communiquer plus vite… ou mieux ?

Depuis quelques années, on entend dire que la Génération Y importe ses outils et usages au sein de l’entreprise. Quel est l’impact réel sur l’e-mail ?

  • Est-ce-que Twitter et autres outils de réseautage social vont avoir la peau du courrier électronique ?
  • Est-ce-que l’e-mail est une technologie passéiste uniquement bonne pour la communication corporate ou bien est-elle complémentaire ?
  • Est-ce-que l’a communication instantanée (ou accélérée) est juste une marotte d’adolescent ou bien est ce un révélateur de changements plus profonds ?
  • Et surtout, y-a-t-il quelque chose qui puisse remplacer l’e-mail ?

Une boîte pleine à craquer. Période numérique, début des années 2000.

L’e-mail est un excellent outil de communication interpersonnelle mais de nouveaux outils font leur apparition. Et dans les faits, si tout le monde a encore le droit d’écrire 5 pages de courriel, plus personne n’en a l’envie. Les messages ont tendance à se réduire en longueur, à devenir plus informels : ils s’adaptent aux rythmes du business, à l’importance du message et aux circonstances dans lesquels ils sont émis. D’où l’apparition de tweets, chats et autres mécanismes de communication.

Le principal problème de l’e-mail est qu’il est utilisé pour tout même s’il n’est pas le moyen le mieux adapté. Envoyé à une ou plusieurs personnes (plus souvent en copie qu’en destinataire), l’usage est parfois « d’arroser » le plus de monde possible afin d’être sûr que personne n’ait raté l’information. Quitte à ce que cela ressemble au final à du spam, et finisse dans le dossier de classement vertical (communément appelé « poubelle »).

Il pourrait être parfois aussi efficace de se lever de son fauteuil et hurler l’information dans l’openspace, mais cela pourrait déranger la quiétude des lieux. Plus sérieusement, l’e-mail n’est pas adapté à de nombreux cas de communication, par exemple une large diffusion avec une volonté d’interaction. Il faut aussi en finir avec une légende urbaine : l’e-mail n’est pas fait pour la collaboration, ni pour la coordination. Avez-vous déjà essayé de mettre à jour une version d’un document sans vous perdre dans les échanges, et au final vous tromper de fichier ? Avez-vous déjà réussi à déterminer un jour commun de réunion entre plusieurs personnes sans que cela ne se finisse par une date imposée ?

C’est exactement ce sur quoi les réseaux sociaux professionnels peuvent apporter une vraie plus-value. En proposant des fonctionnalités de recherche, de coordination, de planification et de collaboration, le besoin en e-mail s’en trouve automatiquement réduit. Vous avez une annonce à faire ? Au lieu de l’envoyer à la Terre entière, postez-la sur la première page de la communauté, lieu de passage obligé de tous lorsqu’ils se connectent. Vous avez une réunion à organiser ? Publiez l’invitation, et suivez en temps réel qui répond venir ou pas. Enfin, si vous avez besoin de retravailler un document, faites en un wiki (sorte de page Word partagée) et suivez les révisions collectives du document.

Une passerelle vers les réseaux sociaux

Tout cela devrait nous permettre de conclure que « plus de médias sociaux = moins d’e-mails ». D’après Nielsen, il n’en est rien :

Ce graphe montre au contraire l’inverse : plus vous êtes utilisateur de réseaux sociaux, plus vous « consommez » de courriers électroniques. La raison en est très simple : en fait, la valeur de l’e-mail est en train de migrer vers le réseau social, et l’e-mail ne devient plus qu’une passerelle, un trait d’union temporel. Il ne sert plus qu’à notifier, tenir au courant des nouveautés postées sur le réseau, suivre les mises à jour (un DM sur Twitter lisible d’un clic depuis un e-mail, le résumé d’une conversation, une nouvelle photo postée). Il est désormais inducteur d’actions. La vraie valeur des informations n’est plus dans l’e-mail, qui devient totalement périssable et jetable, mais dans la plateforme sociale.

Ces e-mails de notification sont en fait une réassurance, une transition en douceur d’un monde à l’autre. Une fois le réflexe pris d’aller sur le réseau social spontanément, il n’est plus nécessaire d’avoir ses notifications. C’est une questions de transition et d’évolution inéluctable des usages.

Pour preuve : à ce jour les entreprises ont de plus en plus tendance à communiquer sur les réseaux sociaux pour leurs relations publiques. Facebook est devenu un nouveau canal de discussion corporate (ce qui peut poser d’autres soucis, comme la confidentialité ou la propriété des données).

Ne nous leurrons pas : la transition sera longue. Raison de plus pour s’y mettre immédiatement ! Le réseau social est un nouvel outil centré sur l’utilisateur et non sur les process. L’e-mail aura toujours sa place dans certains cas (comme la validation d’inscription, les démarchages commerciaux, les notifications en provenance des réseaux sociaux) mais sa valeur va se déplacer. Cette transhumance peut, selon les entreprises et les projets, prendre entre quelques mois ou années. Mais au final c’est à la fois plus d’efficacité, de rapidité, de justesse dans les prises de décision, des rapports humains renforcés et une collaboration interne et externe à l’entreprise généralisée.

Billet initialement publié sur le blog de bluekiwi

Image CC Flickr PaternitéPas d'utilisation commercialePas de modification Frank Gruber et PaternitéPartage selon les Conditions Initiales Biscarotte

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http://owni.fr/2011/04/13/la-mort-de-l%e2%80%99e-mail-et-apres/feed/ 30
Le double jeu de la gamification http://owni.fr/2011/03/10/le-double-jeu-de-la-gamification/ http://owni.fr/2011/03/10/le-double-jeu-de-la-gamification/#comments Thu, 10 Mar 2011 11:46:23 +0000 Rémi Sussan http://owni.fr/?p=50555 La gamification est un des gros buzz du moment.
En janvier 2011 s’est tenu d’ailleurs le premier “Gamification Summit“. Elle consiste essentiellement à se demander ce qui nous attire tant dans les jeux, puis d’en extraire les recettes fondamentales, afin de les appliquer hors du cadre ludique. Au coeur de ce processus se trouve l’idée que le gain de points, l’acquisition d’un statut, sont des moteurs d’amusement suffisants pour encourager les utilisateurs à recourir à un service.

Exemple type, Foursquare, application sur mobile où l’on recommande à ses amis divers lieux dans la ville, celui qui en conseille le plus étant à même de récupérer bons d’achat ou coupons de réductions dans certains des lieux recommandés.

Sur ce point, la gamification se démarque par exemple du “jeu sérieux” qui lui aussi cherche à utiliser le jeu dans les sphères économiques ou éducatives, mais qui prend souvent l’apparence d’un jeu vidéo “classique”, d’où son coût de développement fréquemment élevé, d’ailleurs.

L’inspiration des applications gamifiées, ce sont plutôt ces jeux minimaux, “sociaux, “occasionnels” dont Farmville est l’exemple le plus fameux : interface simple (web ou application mobile), règles minimales, caractère immersif, etc. Et surtout, une forte implication avec le réel : Farmville est considéré comme un jeu “gamifiant”, parce qu’il vous oblige à revenir dans le jeu très régulièrement si vous ne voulez pas que vos récoltes dépérissent.

Selon les thuriféraires de la gamification, le concept devrait bientôt devenir partie intégrante du design de n’importe quel site web. Du coup, de nombreux services comme BigDoor ou Badgeville, commencent à fleurir, proposant à leurs clients de “gamifier” leur site ou leur service : c’est-à-dire, la plupart du temps, fournir une récompense aux gens qui font ce qu’on leur propose de faire.

La gamification roule des mécaniques

Les diverses théories de la gamification se déclinent souvent en quelques points clés bien définis susceptibles de tenir aisément dans une présentation PowerPoint. Et pour cause : l’essence de ce projet est d’extraire un petit ensemble de mécaniques (un terme qui revient constamment) aisément manipulables et utilisables. Ce mot “mécanique”, si souvent employé, le montre bien : on quitte le monde de l’art (car la conception d’un jeu, n’en déplaise aux esprits chagrins, est un art) pour celui de l’ingénierie, sociale ou économique.

Seth Priebatsch (qui occupe le poste de “chef ninja” à SCVNGR, société de création de jeux pervasifs sur smartphone), énumère ainsi quatre caractéristiques fondamentales de la gamification lors de sa conférence TEDx Boston sur la “couche de jeu qui recouvre le monde” (tout en précisant dès le départ en garder trois autres par-devers lui, histoire de conserver un avantage compétitif sur ses concurrents !).
Priebatsch commence par critiquer sévèrement les applications gamifiées qui se contentent d’offrir points et coupons à chaque action. Pour lui, les choses sont plus compliquées que cela (mais, il faut le reconnaitre, à peine plus).

Voici en tout cas les quatre dynamiques de jeu qui permettent selon lui d’influencer le comportement… “En bien, en mal ou entre les deux” :

  • Le rendez-vous dynamique : les participants sont censés se rendre en des lieux virtuels spécifiques, à des moments précis et selon un rythme déterminé. C’est le principe de Farmville, où l’on doit revenir constamment surveiller ses récoltes suivant un timing précis. Si les concepteurs décidaient de changer les règles et d’exiger de leurs 71 millions d’aficionados qu’ils retournent sur le jeu toutes les 30 minutes, cela bouleverserait l’économie du pays, note avec humour Seth Priebatsch.
  • Le statut. Faire partie du club des meilleurs, des happy few, est un mécanisme connu par tous les adeptes de la gamification.
  • La progression dynamique. Elle suppose une série de réalisations progressives, jusqu’à l’obtention de l’objectif. Le succès est ici mesuré par l’accomplissement successif de tâches parcellaires. On retrouve ce principe dans un jeu classique comme World of Warcraft, mais aussi avec le réseau social professionnel Linkedln, où l’on complète peu à peu son profil en se fiant à un système de pourcentage.
  • Enfin, le processus de découverte collective. Dans cette dynamique, une communauté entière est réunie pour travailler sur un sujet et remporter un challenge. Digg, le fameux agrégateur collaboratif de news, en est un exemple. Mais il montre aussi les limites de ce genre de pratique. En effet, raconte Priebatsch, à l’origine du service, il existait un “tableau d’honneur” des meilleurs contributeurs. Or, il s’avéra vite que les sept meilleurs “joueurs” faisaient tout leur possible pour conserver leur statut, essentiellement en recommandant les histoires découvertes par d’autres au lieu de rechercher les leurs propres. L’équipe de Digg dut alors se résoudre à supprimer le “tableau d’honneur”.

Tout le monde n’utilise pas la même liste à puces pour définir la gamification. Pour Amy Jo Kim, spécialiste des communautés en ligne et cofondatrice de la société de jeux Shuffle brain, lagamification se résume à cinq caractéristiques :

  • Collectionner
  • Gagner des points
  • Intégrer un mécanisme de feedback
  • Favoriser les échanges entre joueurs
  • Permettre la personnalisation du service

Il existe bien entendu d’autres listes : l’analyste des technologies Ray Wang, dans Software Insider, en propose deux. La première, assez classique, consiste en cinq points (Intrigue, Défi, récompense, statut, communauté). La seconde est plus originale et plus drôle puisqu’il s’agit des… sept péchés capitaux, qui pourraient être utilisés, selon Wang, comme guide pour une “bonne pratique” de la gamification !

Un concept largement critiqué

Qu’en pensent les théoriciens contemporains du jeu ? Ils se montrent plutôt réservés, pour dire le moins… Ainsi, Raph Koster (souvent mentionné dans nos colonnes), qui tient d’autant plus à mettre les points sur les i que son propre livre, “A Theory of Fun” est mentionné dans un article d’Entrepreneur.com pour illustrer la thèse de la gamificationn :

Je me sens un peu mal à l’aise de critiquer un article qui va certainement contribuer à vendre mon livre… Mais si vous voulez réellement gamifier quelque chose, vous avez besoin de placer au centre du système quelque chose à explorer et maîtriser. Acheter un billet d’avion ou dormir dans un hôtel, ce ne sont pas des choses qu’on maîtrise. Accumuler des points, ce n’est pas de la bonne gamification.

Ian Bogost, autre fameux analyste du monde ludique contemporain, est encore plus sévère. Et pour montrer sa réprobation du concept, pourquoi ne pas l’exprimer dans un jeu ? Bogost a donc créé le “Cowclicking” une application Facebook qui propose au joueur… de cliquer sur une vache.

L’année dernière, annonce-t-il sarcastiquement sur son blog, le phénomène du jeu social Cow Clicker a capturé l’imagination de tous, donnant aux joueurs l’opportunité de cliquer sur une vache toutes les six heures, et même plus souvent.

Et de lancer triomphalement son tout nouveau concept, la “vachification” (“cowclickification”), “l’application de la mécanique du cliquage de vache à des services qui ne cliquent pas les vaches.”

Quand vous vachifiez, vous donnez à votre audience de bonnes raisons d’utiliser votre médiocre site web, application ou service.

Jane McGonigal, qui s’est faite, dans ses différentes recherches et dans son dernier livre, Reality is Broken, la championne de la transformation de l’expérience quotidienne en jeu est moins polémique, mais a mis en garde les adeptes de la gamification lors de son intervention au Gamification Summit : le jeu selon sa théorie, est basé sur le désir de “surmonter des obstacles non nécessaires “.

Donc, l’usage de mécaniques du jeu dans la vie quotidienne ne doit pas être conçu pour faciliter la tâche, mais doit au contraire la rendre plus difficile…

La conceptrice de jeux pervasifs Margaret Robertson qui a créé l’expression “pointification” (voir l’article d’Hubert Guillaud, “Retrouver le plaisir de jouer”) :

Il y a des choses qui devraient être pointifiées. Il y a des choses qui devraient être gamifiées. Il y a des choses qui devraient être les deux. Et il existe beaucoup, beaucoup de choses qui ne devraient être ni l’une ni l’autre.

La gamification, une neuroscience trop simpliste ?

Finalement, la gamification repose sur un modèle particulier de l’esprit du joueur, selon laquelle l’essence même du jeu consiste à lui accorder une série graduée de récompenses afin de le pousser à continuer son activité. C’est ce qu’on pourrait appeler le modèle de la “dopamine”, ce neurotransmetteur souvent associé au plaisir causé par le succès. Or, il se trouve que l’attrait de la récompense n’est peut-être pas le moteur principal du jeu. Une récente expérience psychologique semble indiquer que le problème est (comme toujours avec le cerveau) beaucoup plus compliqué qu’il en a l’air.

Cette recherche montre que les sujets sont plus à même de résoudre un puzzle après avoir vu une petite scène humoristique. Celle-ci les mettrait en condition pour résoudre le problème de manière créative. Pour l’un des chercheurs :

L’humour, cet état d’esprit positif, baisse-t-il dans le cerveau le seuil de détection des connexions plus faibles ou plus éloignées dans le but de résoudre des énigmes ? Cette recherche et d’autres suggèrent que l’attrait des énigmes et la recherche de leur solution va plus loin que la « récompense-dopamine ». L’idée de faire des mots croisés ou un Sudoku place le cerveau dans état ludique qui est en soi une agréable échappatoire.

Autrement dit, la vieille théorie du “cercle magique” chère à Huizinga, selon laquelle le monde du jeu serait séparé de celui du réel par une frontière subtile et difficilement domesticable, garde toute sa valeur. Le jeu signe réellement l’entrée d’un nouvel état d’esprit (on serait tenté de dire : un nouvel état de conscience) dans lequel le gain et la perte ne sont que des éléments secondaires.

Gamification et nouvelles monnaies

Gold farms, World of Warcraft

Pourtant, peut-être ne faut-il, pas jeter le bébé avec l’eau du bain. Quels que soient les défauts de la gamification, elle semble être un terrain expérimental pour un autre domaine en pleine croissance, celui des nouvelles monnaies (voir le dossier en cours de Jean-Michel Cornu). Car en fait, utiliser un système de “coupons” de “badges” ou de points correspond de facto à battre monnaie. Les “monnaies virtuelles” ne sont pas nouvelles. Second Life devait probablement son bref succès au Linden dollar, et tout le monde a entendu parler des “gold farmers” de World of Warcraft.. Mais sans doute la gamification a-t-elle su mettre en avant un aspect des jeux en ligne qui, jusqu’ici, restait un peu à l’arrière-plan (Second Life) ou était franchement illégal (WoW).

Dans un article précédent nous mentionnions l’idée de John Robb, qui affirmait que les jeux en ligne de demain ne feront avancer les choses que lorsqu’ils deviendront eux-mêmes des systèmes économiques bénéficiant aux joueurs, leur permettant de s’épanouir dans un système plus transparent et plus juste que le monde actuel. Il s’agissait en fait d’un système de “gamification” porté à son ultime conséquence.

Depuis, Robb a continué sa réflexion et a lancé un projet d’ “entreprise open source”, basé sur ces idées. Au cœur du système une “métamonnaie” (”metacurrency”, à ne pas confondre avec l’autre projet Metacurrency) susceptible de récompenser de manière objective et transparente le travail fourni par l’internaute. Exactement l’équivalent des “badges” ou des points de la gamification. Comme illustration de son concept, il lance aujourd’hui “PictureThis“, une espèce “d’Open Streetview” où chacun est invité à photographier son environnement, recevant des parts de la société en récompense des images envoyées sur le site.

Vue sous l’angle de la monnaie, la gamification prend un tout nouvel intérêt : elle nous aide à comprendre que la monnaie n’est pas seulement un système d’échange, mais possède également une dimension cognitive et émotionnelle, dimension que le jeu exprime bien mieux que la pensée économique traditionnelle.


Article initialement publié sur Internet Actu sous le titre “Les ambiguïtés de la gamification”

Illustrations via FlickR: Gold farm par isfullofcrap [cc-by] ; Manette de jeu par Wizzer [cc-by-nc-nd]

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Barcelone 2011: le smartphone, compagnon de notre vie connectée http://owni.fr/2011/02/18/barcelone-2011-le-smartphone-compagnon-de-notre-vie-connectee/ http://owni.fr/2011/02/18/barcelone-2011-le-smartphone-compagnon-de-notre-vie-connectee/#comments Fri, 18 Feb 2011 15:00:33 +0000 Eric Scherer http://owni.fr/?p=47346

Pas moins de 135 délégations gouvernementales présentes cette semaine à Barcelone, lors du Congrès annuel mondial des mobiles [en] et 55.000 professionnels, dont beaucoup venus d’Asie, pour assister au mariage enfin consommé de l’Internet et des telcos.

Voici quelques grandes tendances observées :

1 – Compagnon de tous les jours pour communiquer et accéder au web, le smartphone devient le centre de notre vie numérique.

Cette tendance déjà très visible début janvier au CES de Las Vegas, s’accélère vite, plus vite encore que les experts ne l’avaient prévu puisque :

  • C’est officiel depuis la semaine dernière ! Les ventes mondiales de smartphones ont dépassé [en] celles d’ordinateurs au 4ème trimestre 2010.
  • Leur taux d’adoption, dans les pays riches, a fait un bond de 10 points en an, pour atteindre 31% des Européens qui ont un mobile et 27% des Américains. Au Japon, ils sont déjà 75% ! Mais la France est à la traîne des grands pays. (comScore)

D’ici peu, plus de gens accéderont à l’Internet via les mobiles que par les ordinateurs. La moitié des ventes de Vodafone en Europe sont des smartphones. Au Japon, c’est 85% des lycéens qui s’équipent ainsi. D’ici 2015, 7 à 8 milliards de comptes mobiles seront connectés, contre 600 millions aujourd’hui, selon Ericsson.

Les clés du succès des smartphones aujourd’hui ? Les jeux, les applications et les réseaux sociaux, a résumé Eric Schmidt, le président de Google. Son OS Android est récemment passé 1er mondial devant l’iPhone d’Apple, mais le Blackberry reste n°1 aux États-Unis. En 2010, le nombre de possesseurs de mobile ayant échangé sur des réseaux sociaux via leur téléphone a fait un bond de 75% en Europe et de 56% aux États-Unis.

Les smartphones, presque aussi rapides et puissants que des ordis de la maison, sont désormais un des maillons de la chaîne d’appareils (ordis, tablettes, téléviseurs) qui laissent s’écouler sans friction les contenus des médias de l’un à l’autre.

Comme le disait le patron d’AT&T, plus de la moitié des gens consomment le même contenu sur plus de trois outils : ils ne sont limités ni par les outils ni par les OS. « Il faut donc transformer les outils en applications ».

2 – La révolution des données, nouvelles monnaies en circulation de l’économie en réseau de l’information.

Leur transport explose (+100% par an en Chine, + 50% en Europe et aux États-Unis, 33% en Inde, prévision d’une multiplication par 30 d’ici 2015 dans le monde). Les tablettes y jouent, bien sûr, un grand rôle.

La Chine demande que le wifi soit installé par défaut sur les smartphones et travaille avec la Corée et le Japon à un système de roaming international Wifi. Dans quelques années, il y aura quatre fois plus de gens reliés au web par mobile que par ordinateur.

Heureusement pour les opérateurs, confrontés à la hausse des coûts d’investissement des infrastructures, le transport de données, en croissance exponentielle, commence – comme au Japon – à remplacer la voix en terme de profitabilité. Ils comptent sur le public pour accepter de payer des services à valeur ajoutée, contrairement à la musique et aux news.

Au rayon nouveautés, à noter :

Le 1er smartphone à écran 3D : l’Optimus de LG
Le smart phone de HTC avec son bouton Facebook (pour partager d’un clic)

3 – Les telcos veulent aussi être au centre de l’Internet des objets et des services.

Les opérateurs, confrontés à la saturation du marché des mobiles, à la chute de la valeur du transport de la voix et aux nouveaux concurrents du web, se transforment en entreprises de services Internet mobiles et reprennent confiance. Leurs modèles d’affaires, comme ceux des équipementiers, est en train d’évoluer.

Le smartphone, nouveau mode de paiement !

Après, la musique il y a dix ans, puis la presse et la TV il y a quelques années, c’est au tour d’autres secteurs d’être, touchés par la grâce de la mobilité (et donc d’arriver en masse à Barcelone) : cette année, la banque !

Les prochaines grandes fonctions des smartphones, déjà actives dans de nombreux pays (Japon, Corée), seront les transactions connectées, contribuant ainsi  à l’essor de l’e-commerce et l’e-ticketing. Nokia, Blackberry sont en pointe avec Deutsche Telekom, Vodafone, Telefonica, Orange, Barclays Bank. Les opérateurs, habitués à la facturation et au contact avec le client final, sont ici à l’aise.

Avec des cartes SIM implantées partout, l’Internet des objets devient l’Internet de tout… ce qui est connectable.

« Et tout ce qui est connectable sera connecté d’ici quelques années », aime à répéter Eric Schmidt. « Y compris des animaux et des plantes vertes », comme l’a souligné le patron du géant China Mobile.

Les services vont converger, sans effort, d’un appareil de la maison à l’autre, d’un équipement (automobile, chantier, distributeurs automatiques…) à un autre.

« Le smartphone en sera le centre », assure le président de Qualcomm, Paul Jacobs.

Les opérateurs entendent jouer un rôle croissant dans ce « tout connecté ». Une maison [en] bourrée de cartes SIM a ainsi été montée dans la foire pour montrer comment nos vies seront demain connectées : de la cuisine à la voiture qui devient un petit environnement wifi.  Ce que le PDG de NTT Docomo nomme « le mobile embarqué », d’autres le « M2M » (machine to machine). Avec à la clé, d’énormes problèmes d’interopérabilité non résolus.

Autres secteurs en plein développement du mobile connecté : la santé, l’automobile, l’éducation, l’édition, la publicité, les services publics, etc.

D’ailleurs des congrès associant spécifiquement la téléphonie mobile aux modes de paiement et à la santé se tiendront cette année respectivement à Singapour et au Cap.

Certains opérateurs, comme le Japonais NTT n’hésitent  pas à se diversifier fortement : ebooks, systèmes de navigation automobile, cadres de photo numérique, systèmes de paiement électronique, distributeurs automatiques, consoles de jeux, etc.

4 – Les tablettes pour les loisirs : il y a un an il n’y en avait pas, aujourd’hui elles sont partout !

Si la consommation de contenus médias et « entertainment » n’est pas encore prédominant dans les smartphones, elle explose dans les tablettes. À l’instar de l’essor de la vidéo.

Toutes les nouvelles tablettes étaient présentes à Barcelone : celles de Samsung, HP, LG, Motorola Dell, la Playbook de Blackberry (RIM) [en], etc.

La nouvelle culture des applications :

Face au succès des applications, huit grands opérateurs et une soixantaine de partenaires ont ouvert cette semaine au public leur plate-forme commune d’applications (WAC), lancée l’an dernier, pour lutter contre la fragmentation des formats et éviter qu’un ou deux géants (Apple et Google) ne contrôlent le marché.

Mais les magasins d’applications, étagères du web, restent pour l’instant en silos séparés et posent des problèmes de bande passante aux opérateurs.

Près de 10 milliards d’applications ont été téléchargées en trois ans (environ un tiers payantes), 60 en moyenne par utilisateur, le marché est estimé à 17 milliards de dollars en 2011, et un hall entier leur est consacré à Barcelone, depuis l’an dernier.

Cette « applification du web », qui concerne en premier lieu les jeux et les loisirs, est en train d’arriver aussi sur les futures télévisions connectées.

La vidéo s’envole dans les usages Internet, pour les mobiles aussi.

Les consommations de contenus changent : 66% du trafic de l’Internet mobile devrait être le fait de la vidéo d’ici 2015, selon Cisco. Le Japon est le 1er de la classe pour la bande passante mobile, suivi des États-Unis et de l’Europe, selon NTT Docomo.

5 – Technologies : tout repose sur l’association mobilité, réseau à haut débit et « cloud ».

La 4G et la norme LTE commencent à se déployer permettant des connexions plus rapides. Mais l’Europe est en ici retard face au Japon et aux États-Unis.

  • Aujourd’hui c’est « mobile first », comme le dit Eric Schmidt. « C’est là où ça se passe ! Le mobile devient le nouveau PC. Ajoutez-y le réseau et le cloud computing et vous avez le trio gagnant. »
  • « Prenez chacun de vos appareils et songez que d’ici peu ils seront connectés dans les nuages. » (E. Schmidt)

Google croit aussi dans le langage web « html5 », qui, après avoir un peu évolué, sera utilisé d’ici quelques années dans de très nombreuses applications.

En détectant de plus en plus ce qui se passe autour de nous, notre contexte immédiat, notamment via la réalité augmentée, les smartphones deviennent notre sixième sens, assure le patron de Qualcomm.

La neutralité du Net en danger : les opérateurs se plaignent aussi de payer pour des infrastructures très onéreuses et utilisées gratuitement par d’autres, comme YouTube.

Réponse d’Eric Schmidt de Google : les pouvoirs publics devraient mieux redistribuer les ressources disponibles en bande passante, les utilisateurs doivent être encouragés le plus possible à switcher en Wifi, et nous partageons déjà des revenus sur le search mobile.

Le Congrès a été aussi dominé par le renoncement de Nokia sur les logiciels via son accord avec Microsoft. Un Congrès comme toujours boudé par l’éléphant dans le magasin de porcelaine… Apple !

What’s next ?

Beaucoup de pistes séduisantes évoquées ici, à Barcelone. À suivre, dans un prochain billet. Promis.

Billet initialement publié sur Metamedia

Image de une CC Flickr kirainet

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Non à la “curation” http://owni.fr/2011/02/13/non-a-la-curation/ http://owni.fr/2011/02/13/non-a-la-curation/#comments Sun, 13 Feb 2011 13:00:21 +0000 Titiou Lecoq http://owni.fr/?p=46305 L’autre soir, je prenais l’apéro avec le binôme de l’Internet (elle et lui). Elle sortait d’une conférence sur la curation. Evidemment, j’ai commencé par hocher la tête d’un air entendu. Parce que, soyons clairs, je connais le mot “curation”. Je le connais suffisamment pour savoir qu’il existe pour de vrai. Par exemple, au scrabble, on me sortirait le mot “curation”, je validerais. Juste, je sais pas exactement, ni même généralement, ce qu’il veut dire. Du coup, Mélissa m’explique le nouveau sens web de curation. Elle a fait un article dessus ici. (Mais on va y revenir après un détour sémantique.) Et Techcrunch aussi. Si on prend l’article de Techcrunch, on a bel exemple de “la langue française est dead, amis étudiants en lettres, laissez tomber, vous pouvez toujours essayer de vous pendre avec vos Littrés”.

Donc en anglais, le mot curator désigne les conservateurs de musée qui choisissent des tableaux pour organiser une exposition. Appliqué au web, the curation veut donc dire le fait d’organiser des liens. (On va y venir après que je vous auras appris à bien parler le navarrois.) Et Techcrunch nous balance : “la “curation” – à ce stade vous comprendrez que je renonce à traduire le mot en français”. Ah bah non, perso je comprends pas bien, vu que le mot curation existe en français mon gars. Donc là, on est face à un gros problème de traduction. On ne peut pas traduire “the curation” par “la curation”, vu que les deux mots ne désignent pas la même chose. La curation en français c’est le traitement des plaies, des maladies. En plus, vu comment déjà la France, elle aime pas le web, qu’elle considère comme une jungle, si maintenant on le considère comme une maladie à soigner, ça va pas arranger nos affaires mes enfants.

Le syndrome du community manager?

Evidemment, le combat est perdu d’avance. Déjà, insidieusement, les commissaires d’exposition avaient commencé à employer le mot curation dans son sens anglais. Et on va tous dire “curation”. Mais voilà, au moins, vous, vous saurez que “curation” c’est pas juste un mot importé de l’anglais mais aussi un mot français dont le sens n’avait rien à voir. Ah Saussure, ils sont devenus fous… Bref, venons-en à la web curation. La magie de ce mot, c’est de définir un truc qui existe depuis que le web est web et depuis que le lien est lien. C’est donc organiser une sélection de liens. Parce que d’un côté l’internet, c’est le bordel, que y’a plein de contenus, et que de l’autre y’a des gens qui n’ont pas grand chose à faire de leur vie et qui aiment bien faire partager ces liens à leurs amis. Ces branleurs sont donc des curateurs (ou des curators, on sait pas encore), ce qui a vachement plus la classe. Par exemple, au hasard, moi.

Comme vous n’aurez pas manqué de le noter, ami lecteur mon frère, au moins une fois par semaine, je fais un post avec des liens coolos que j’ai trouvés sur le web. Comme Diane fait dans la revue du web des Inrocks ou Alexis dans la revue du web de GQ. Ca pointe aussi une des caractéristiques de l’internet : “on publie d’abord le contenu avant de le filtrer” (dixit Dominique Cardon). Ce qui m’inquiète un peu là-dedans, c’est que du moment où on a trouvé un mot pour désigner le truc, on risque la professionnalisation. Bientôt, je vous parie le bras de ma mère qu’on aura des stage de curation et des offres d’emploi de curateurs. Y’avait eu la même chose avec les community managers (rappelons donc : ces gens qui connaissent les mystères impénétrables des réseaux sociaux comme Facebook). Et ça, je sais pas pourquoi, ça me déprime complètement.

L’avenir est sombre

Pourtant, aller chercher des liens coolos sur l’interweb et les organiser, oui c’est du boulot. Et oui, vu l’architecture du web, c’est plutôt nécessaire. Mais là, ça me donne l’impression qu’on va se faire gicler par des étudiants en école de commerce qui deviendront curateurs professionnels, qui l’envisageront uniquement comme un boulot et pas par amour. Parce qu’il y a un amour du beau lien. Avant de devenir des curateurs professionnels, Diane, Alexis et moi passions nos vendredis soirs à se montrer des liens rigolos sur l’interweb, pour le plaisir. Je sens confusément qu’il y a là matière à prolonger ma réflexion sur la mort du web et la quiche lorraine mais je suis un peu trop fatiguée pour ça. Bref, internet est devenu une affaire sérieuse de grandes personnes assez chiantes, exactement comme le mot curateur, et comme les images qui vont avec.

Preuve s’il en fallait que l’avenir est sombre : à peu près toutes les occurrences de curation vont de paire avec les mots “marketing” et “marques”. Mais qu’est-ce que les marques viennent foutre dans des revues du web sympatoches ? Je tombe sur un titre effrayant : Curation, la prochaine étape du marketing de contenu. Le marketing de contenu. Aka la pub intelligente. Aka la mort.

Donc attention, citation pour marketeux en mal de poésie :

Au-delà de la curation de masse, la pertinence de ce type de service réside dans une évolution du discours des marque sur les médias sociaux. Scoop It spécule sur l’inflation du content marketing pour générer du chiffre d’affaires : Sur le discours des marques nous en sommes au début en termes de marketing social. Que ce soit du brick and mortar ou autre, aujourd’hui elles ont une page facebook, un twitter et elles payent un content/community manager pour animer le tout. Mais les marques n’ont pas forcément quelque chose de pertinent à dire quotidiennement. Plutôt que de se concentrer sur ses messages corporate, une marque peut parler de sujets liée à son domaine d’intervention, le sport, la nourriture etc… Ce qu’on leur propose c’est de devenir des curateurs.  Cela leur permet de créer une affinité avec son domaine et en plus c’est un modèle vertueux : elles peuvent créer une image de marque à moindre coût en utilisant notre service premium proposé en SaaS….

Donc, les marque pour avoir l’air sympa vont faire des veilles internet sur les sujets qui les concernent et faire des revues du web. Autant dire qu’on est très très loin de nos vendredis soirs chez Dianou passés à rigoler devant des gifs animés. Si les marques se lancent dans la curation, moi je veux bien et même je leur laisse ce mot affreux. (Curation, ça rappelle quand même beaucoup curetage. Allez-y donc, allez avorter l’internet.) Donc, je propose (je sais que je serai pas suivie, je m’en fous, je suis tel le prophète qui crie seul dans le désert), que le mot curation ne désigne QUE le fait d’éditorialiser des liens au service des marques. Pour les autres, on vivait très bien sans mot pour définir notre activité. Donc on continuera tranquillement à faire des liens vers des trucs qu’on aime bien et qu’on a envie de partager parce qu’on est webfriendly.

Ce billet a été initialement publié sur Girls & Geeks

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Crédits photo: Mary Hutchinson, Ozone9999

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Apprendre à questionner? Quand Socrate peut encore être utile! http://owni.fr/2011/01/28/apprendre-a-questionner-quand-socrate-peut-encore-etre-utile/ http://owni.fr/2011/01/28/apprendre-a-questionner-quand-socrate-peut-encore-etre-utile/#comments Fri, 28 Jan 2011 14:05:38 +0000 Bruno Devauchelle http://owni.fr/?p=44081

Les débats autour des compétences informationnelles des jeunes, leurs habiletés, leur naïveté, leur absence de sens critique sont entrés désormais dans le champ de la banalité. Ils acquièrent des connaissances « futiles » et pas des connaissances « utiles », déclarait un orateur lors de la conclusion du séminaire sur le manuel numérique organisé par le ministère de l’Éducation les 20 et 21 janvier à l’ENS de Lyon. Ils ne maîtrisent pas réellement l’ordinateur disent les autres enseignants, il leur faut des cours d’informatique disent encore d’autres, fiers d’annoncer qu’ils ont obtenu une option informatique en terminale et que l’informatique entre à nouveau dans l’enseignement.
Mais ce qui est le plus étonnant dans ces débats c’est que, dans la plupart des propos, deux dimensions sont ignorées ou modestement avancées, mais jamais intégrées dans les raisonnements : la première dimension est la question de la maîtrise des adultes, l’autre est la définition de la culture informationnelle. Enfin une proposition récurrente traverse toutes ces prises de parole, que le monde académique saurait définir ce qu’il faut maîtriser et que ce qui n’en fait pas partie est donc une « futilité », une « illusion ».

L’histoire est têtue, à moins qu’à nouveau l’amnésie ne continue de faire des ravages : « Dans une classe de lycée, remplacer Racine par Brecht, c’est modifier le rapport de l’enseignement avec une tradition autorisée, reçue de chez nous, liée aux pères et à des valeurs  « nobles » ; c’est aussi introduire une problématique politique contraire au modèle culturel qui établissait le maître (d’école) en manuducteur de l’expression populaire. » (manuducteur : “se disait autrefois d’un officier qui, placé au milieu du chœur, donnait le signal aux choristes pour entonner, marquait le temps et battait la mesure.” Littré en ligne). L’auteur de ce propos poursuit un peu plus loin de la manière suivante : « Chez les enseignants est apparu un sentiment d’insécurité. Il coexiste avec la conscience de leur extériorité par rapport aux lieux où la culture se développe, l’usine, les mass media, les techniques, les grandes entreprises… L’enseignant flotte à la surface de la culture : il se défend d’autant plus qu’il se sait fragile. Il se raidit. Il est porté à renforcer la loi sur les frontières d’un empire dont il n’est plus sûr. » À ce texte publié en 1974, il est intéressant d’associer un texte publié en 1983 : « Faut il encore une école ? Oui et plus que jamais, pour trois raisons : la communication, la distance, la mémoire [...] l’école pourrait d’abord être le lieu de la « table du savoir », table au sens traditionnel. Non pas tant le lieu de la communication du savoir, mais le lieu de la communication entre des hommes qui ont emmagasiné des connaissances à partir de la multiplicité de leurs récepteurs individuels. »

Repli du monde académique face à l’émergence d’une culture autre que celle qu’il promeut

Renvoyons donc à la lecture du livre La culture au pluriel de Michel de Certeau (Points 1973 – 1987) ainsi qu’à celle du livre Les nouveaux modes de comprendre de Pierre Babin et Marie France Kouloumdjian (Le Centurion 1983). Bien d’autres auteurs nous ont avertis depuis longtemps, le signe de la peur du monde académique c’est son déni ou sa tentative de normalisation lorsqu’une culture autre que celle qu’elle promeut émerge. Avec les TIC il y a malheureusement plus de trente années que l’on observe cela. La lecture de cet article de François Cardinal devrait pourtant nous faire réfléchir. Intitulé  » Nos élèves, ces illettrés numériques… » l’auteur met en évidence la carence du monde scolaire. Sans entrer dans le détail de l’argumentaire (un peu léger cependant), on peut déceler derrière ces propos les trois dimensions qui sont proposées à notre réflexion ici.

En filigrane de ce propos et en faisant du lien avec de nombreuses observations, les enseignants, comme de nombreux adultes, sont très loin de maîtriser l’usage de ces technologies mais ce sont parfois (mais pas toujours) les mêmes qui voudraient imposer aux jeunes cette maîtrise dont ils ignorent même le sens réel. Car c’est le contour de cette maîtrise qui a bien du mal à émerger des propos des uns et des autres. Les critiques nombreuses du B2i ou du C2I n’ont que rarement amené à un réel travail de recomposition (comme celui, par exemple, qui avait été fait entre 2006 et 2008 à propos de la « numériculture ». Or le mérite de ces certifications était bien de s’attaquer aux deux supposés problèmes posés par les TIC à l’école : un travail technique et un travail culturel. Certes il y avait à redire et nous n’avons pas manqué de le signaler, mais force est d’observer que les résistances, mais surtout les oppositions (au-delà des rituels “temps-moyens-formation”) ont été nombreuses. Quant à la distance critique, l’ignorance n’a jamais permis de la créer. C’est au contraire de la connaissance que nait la distance critique ; relisons Condorcet pour s’en convaincre, mais observons qu’autant il cherchait à ouvrir vers la connaissance, autant il cherchait à imposer un contrôle fort sur cette connaissance, ce contrôle repris ensuite par Jules Ferry et continué encore de nos jours par de nombreux acteurs politiques de l’éducation.

Un enseignant se questionnait l’autre jour à propos des opinions personnelles : comment en tant qu’enseignant amener les élèves à dépasser les « premières impressions »  pour aller vers la distance critique sans entrer dans le même cercle infernal qui consiste à opposer l’opinion de l’enseignant à celle de l’élève ? La meilleure réponse trouvée est tirée de deux approches : le questionnement socratique (la maïeutique), le scepticisme argumenté (et non de principe). Malheureusement l’enseignant nous disait qu’avec l’environnement médiatique, il se sentait lui même en grande difficulté pour y parvenir. Manque d’outils d’analyse, manque de connaissance sur les dispositifs et les techniques, manque de connaissance de l’histoire des évolutions scientifiques et techniques, etc.
Interrogeons les enseignants du secondaire et du supérieur sur leur sentiment de maîtrise des TIC, mais aussi de l’environnement informationnelle et de la culture associée (information literacy…) et l’on se rendra rapidement compte qu’ils rivalisent souvent avec leurs élèves mais dans un autre sens : si souvent ils se sentent apte à maîtriser cet environnement, quelques mises en situation nous révèlent rapidement qu’une grande majorité reste très démunie et n’a, comme les élèves que des compétences de surface. Car les contextes sont nouveaux : non seulement il y a la maîtrise technique, mais aussi il y a la gestion dynamique de l’information et de la communication. Or ces deux champs de compétences ne sont pas aussi développés qu’on le pense : il suffit d’ailleurs pour s’en convaincre de noter l’importance de la demande de formation dans ces domaines chaque fois qu’on évoque le développement des TIC dans l’enseignement. Or la particularité de ces évolutions est de ne pas se satisfaire d’une connaissance théorisée et de nécessiter une pratique avancée régulière et surtout une forte capacité à « apprendre de l’expérience ». Et cette dernière compétence est particulièrement développée, dans le domaine des TIC par les jeunes (mais pas théorisée…).

Les cours d’informatique, d’information, de communication : de bien belles intentions…

Faire des cours d’informatique, faire des cours d’information, faire des cours de communication…. Belles intentions et nécessités probables, mais largement insuffisantes si elles ne sont pas précédées d’une longue analyse des pratiques spontanées (futiles) mais surtout très avancées, mais pas dans le sens scolaire… Or l’une des constantes des discours sur le domaine va à l’envers : commencer par faire cours et ensuite appliquer ! Mais d’abord cela n’est pas le modèle d’apprentissage développé par nos élèves, et ensuite c’est de « processus de structuration » dont ont réellement besoin les jeunes comme les adultes. Le sens des cours d’informatique ou de communication etc. n’apparait pour les jeunes que s’il permet de comprendre des pratiques réelles non scolaires d’abord et s’il leur permet d’aller plus loin en les amenant à des pratiques « structurantes » et « analysées »; mais pas seulement dans ces cours mais surtout dans toutes les occasions d’usage. Et c’est bien là que très souvent le frein est mis. Mais comme pour la méthodologie, impossible de développer des compétences sans contexte ; comme pour l’apprentissage, un savoir ne se transforme en connaissance que s’il est utilisé, et pas dans des exercices systématiques, mais dans des situations complexes. C’est pourquoi ces savoirs, informatiques, informationnels et communicationnels ne peuvent être d’abord étudiés pour eux-mêmes.

Quand à l’esprit critique, il ne peut se développer que dans cette dialectique qui permet de comprendre que les outils ne sont jamais neutres, et qu’ils prennent sens dans des contextes dans lesquels les acteurs les manipulent, les utilisent, les « instrumentalisent ». Les enseignants sont en réalité très démunis pour mettre en œuvre cet esprit critique pour eux-mêmes et aussi pour le faire développer par leurs élèves. Il y a plusieurs explications à cela dont la principale est que cela demande du temps et de l’activité, ce qui va à l’opposé d’un système scolaire qui « accumule » toujours plus de savoirs sans toujours se poser la question de leur maîtrise, et de la durée nécessaire à leur maîtrise. Les TIC ont cette particularité d’être disponibles aussi bien dans le système d’enseignement qu’en dehors, il est très regrettable que l’on ne profite pas de cela pour faire du lien, et préférer trop souvent une opposition, voire dans certains cas un mépris…. Or les jeunes sont en train de rendre au système scolaire un retour assez juste de cette opposition : ils l’ignorent…

À suivre et à débattre…

Billet initialement publié sur le blog de Bruno Devauchelle

Image CC Flickr World Bank Photo Collection et Debby A remixé par OWNI

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Hypemachine, le top intelligent http://owni.fr/2011/01/27/hypemachine-le-top-intelligent/ http://owni.fr/2011/01/27/hypemachine-le-top-intelligent/#comments Thu, 27 Jan 2011 17:59:39 +0000 Simon Decreuse http://owni.fr/?p=29933 La crédibilité des classements charts et tops censés refléter le goût des gens et guider les professionnels dans leurs choix, est mis à mal par la mutations des usages. Simon Decreuze propose une analyse des classements publié récemment par Hypemachine.

Le site Hypemachine, qui agrège la grosse majorité des blogs musicaux du monde, vient de publier cette semaine son Zeitgeist 2010, comprenez les morceaux reflétant le mieux l’année passée. L’occasion de rappeler ce qu’est la Hypemachine.

Vous connaissez les blogs, ce moyen simple de s’exprimer en ligne, sachez que certaines personnes s’en servent pour échanger autour de la musique. Mais comme la musique n’est jamais aussi bonne que lorsqu’on l’écoute, ces blogueurs mettent à disposition de l’internaute les morceaux dont ils parlent (souvent avec des fichiers mp3). Cela parait évident aujourd’hui, mais ce sont ces blogueurs qui ont popularisé la pratique.

A l’époque tout le monde ouvrait son blog en ayant peur d’être forcé de fermer dans la foulée (et ça a été le cas pour nombre d’entre eux). Au même moments les sites d’actualité musicale devaient batailler ferme avec les labels pour récupérer ne serait-ce qu’un extrait utilisable légalement en ligne…Le nombre de blogs a, entre temps, explosé. La partage d’mp3 s’est banalisé et les labels ont bien compris que cette armée de blogueurs bénévoles était une force de communication incroyable pour leurs productions.

Revenons à la hypemachine. En 2005, Anthony Volokin, un étudiant en université, se rend compte du potentiel des blogs musicaux et décide de créer une sorte d’annuaire qui permettrait d’écouter l’ensemble des morceaux mis en ligne facilement. Il ajoute à tout cela une couche sociale qui permet de savoir ce qu’écoutent ses amis, de traquer certains blogs, certains artistes ou certains mot clés. Un service essentiel qui fait office également d’archive incroyable pour une partie de la production musicale mondiale. Hypemachine c’est + de 100 000 visites par jour.

Et donc ce site vient de publier un classement des artistes, albums et morceaux les plus populaires sur sa plateforme. Au risque de vous surprendre, l’actualité mondiale de la musique en ligne n’a rien à voir avec la programmation des radios et encore moins des chaines musicales. L’artiste le plus blogué cette année c’est Yeasayer, un groupe de rock atypique que je n’affectionne pas particulièrement, avec des sonorités typées années 80. L’album que les utilisateurs ont le plus apprécié cette année, c’est celui d’Arcade Fire appelé “the Suburbs“, si vous ne l’avez pas encore écouté, allez-y cela ne peux pas vous faire de mal. Enfin, et c’est assez bizarre le classement du meilleur titre n’en est pas un, c’est en fait une sélection exhaustive des titres qui ont été “likés” par les utilisateurs dont vous pouvez retrouver la liste ici.

Ce classement, vous l’aurez remarqué, met clairement en avant les productions d’Amérique du Nord, mais puisqu’il est le résultat des gens actifs sur la toile, il ne tient qu’à vous, amis de Francophonie, de mettre en avant la musique qui vous plait !

Article intialement publié sur: atelier des médias

Crédits photos CC flickr: samchurchill; lady madonna; gtmcknight

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