OWNI http://owni.fr News, Augmented Tue, 17 Sep 2013 12:04:49 +0000 http://wordpress.org/?v=2.9.2 fr hourly 1 Telecomix crée la mémoire vive des révolutions http://owni.fr/2011/12/30/telecomix-cree-la-memoire-vive-des-revolutions/ http://owni.fr/2011/12/30/telecomix-cree-la-memoire-vive-des-revolutions/#comments Fri, 30 Dec 2011 14:23:14 +0000 Julie Gommes http://owni.fr/?p=91986

Les observateurs de la ligue arabe n’ont rien vu à Homs, épicentre la contestation en Syrie. C’est du moins ce que critiquent la France et des organisations de défense des droits humains. Arrivés lundi pour rendre compte de la situation sur place, ils ne sont restés que quelques heures à Homs pendant la journée de mercredi, la plupart du temps sous les yeux et l’encadrement attentifs de responsables syriens.

Bientôt, les internautes pourraient devenir des observateurs, grâce à un portail de vidéos créé par le collectif de hackers, Telecomix. Le groupe d’hacktivistes a déjà à son actif un coup de main à la révolution tunisienne et le rétablissement des communications et d’Internet en Egypte au plus fort de la répression. A Berlin pour le 28e Chaos Computer Congress , qui rassemble bidouilleurs et autres experts en sécurité informatique, plusieurs hacktivistes du collectif ont annoncé la création du portail. Parmi eux, le jeune blondinet KheOps, qui n’hésite pas à parler à visage découvert sur les télévisions françaises :

Maintenant, on essaie de regrouper les vidéos qui sortent en les classant par lieu et date, de manière à ce que des journalistes fassent du recoupement pour savoir ce qu’il s’est passé dans la même ville sur plusieurs semaines, mois…

L’idée est de recréer une mémoire vidéo de cette révolution syrienne, mémoire déjà développée en anglais et en arabe, via un site de news from the ground mis à jour en temps réel par des agents Telecomix et des Syriens qui participent au projet. KheOps est l’un des fondateurs de l’opération Syria. OpSyria, qui dure à présent depuis plus de six mois, est loin de s’enfoncer dans un rythme de routine : “Même si on a moins fait de choses spectaculaires, maintenant, il faut entretenir et créer de nouvelles choses techniques en permanence.”

Court-circuiter les espions

Des innovations qui permettent aux Syriens, chaque jour, de se connecter de manière plus sécurisée, comme l’explique KheOps :

Par exemple avec le point de sortie VPN. Il s’agit d’avoir un serveur avec une connexion correcte situé dans un pays qui ne soit pas la Syrie ou un pays ami de la Syrie, de sorte que les espions syriens n’y aient pas accès.

Grâce à ce travail quotidien, les utilisateurs syriens peuvent se connecter sur ce serveur, ce qui lui permet ensuite d’utiliser Internet sans que les services de sécurité ne s’en aperçoivent.

Quelques semaines après le début de la révolution Syrienne, les hackers de Telecomix avaient choisi de détourner les réseaux locaux pour permettre aux Syriens de faire sortir des images et des informations du pays, mais aussi d’apprendre quelques règles simples de sécurité et d’anonymat sur Internet. L’énorme prouesse technique permet aujourd’hui à des hacktivistes syriens de contourner la censure.

Infrastructure technologique

Okhin, un des Français de l’opération rappelle que les moyens du collectifs restent limités et qu’en aucun cas, ils ne remplacent les révolutionnaires :

On essaie de trouver de nouvelles façons d’aider les Syriens, de trouver de nouvelles façons de récupérer des nouvelles sur le terrain, on essaie de faire tout ce qu’on fait jusqu’à présent. On a eu juste à fournir une infrastructure technologique.

Kazakhstan, Russie, Cuba, les dictatures et les projets ne manquent pas : “On est volontaires, on fait ça sur notre temps libre, on ne peut pas sauver le monde” précise Okhin. Et de rappeler la conférence de la veille : “J’ai appris qu’en Turquie, ils commencent à s’organiser eux-mêmes, pas forcément à demander l’aide de Telecomix, mis à part un soutien technique. Pour changer les choses, ils doivent développer leurs propres clusters. »

Le collectif Telecomix regroupe des hacktivistes de différentes nationalités qui vivent parfois sur des fuseaux horaires totalement différents. C’est le cas de l’imposant Américain qui se fait appeler Punkbob. Il commence de son côté, avec d’autres, à travailler sur le Kazakhstan :

L’Internet n’y est pas libre, ils ne peuvent pas se connecter aux sites qu’ils veulent. On a aussi un regard sur la Russie…


Illustrations via FlickR [cc-byncsa] Ophelia Noor

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Des hackers interviennent en Syrie http://owni.fr/2011/09/14/syrie-des-hackers-font-tomber-le-mur-de-la-censure/ http://owni.fr/2011/09/14/syrie-des-hackers-font-tomber-le-mur-de-la-censure/#comments Wed, 14 Sep 2011 09:51:04 +0000 Julie Gommes http://owni.fr/?p=79367 Dans la nuit du 4 au 5 septembre, à 2h53, KheOps (le pseudonyme d’un hacker familier des actions politiques) a “appuyé sur le bouton”, comme il le dit modestement, et détourné l’Internet en Syrie. Dès lors, les internautes syriens étaient automatiquement redirigés vers un site web expliquant pourquoi, et comment, contourner la censure et protéger leurs communications sur le Net :

Il nous fallait imposer notre message. Nous l’afficherions sur leurs écrans, par surprise, et sans qu’il soit possible de l’éviter, et durant un temps suffisamment long pour qu’ils n’aient d’autre choix que de le lire.

Et ils choisirent quatre fois, cette semaine-là, de passer ainsi par-dessus les murs de la censure syrienne. Ils, ce sont les Telecomix, un collectif de hackers qui s’était déjà illustré, lors du Printemps arabe, en aidant les internautes de Tunisie et d’Egypte à déjouer les cybercenseurs.

Les internautes se connectaient alors sur le canal IRC de Télécomix, ne faisant parfois que passer, certains laissant quelques mots : “Ce qui revenait tout le temps, c’est la peur des mukhabarats (NDLR : la sécurité d’État syrienne) et de savoir si on était ou non Israéliens. Autant pour l’intelligence je comprends autant pour le reste… Je ne sais toujours pas pourquoi” s’interroge KheOps, l’un des hackers les plus actifs sur le projet (voir aussi son émouvant témoignage sur Reflets.info). Il fallait rassurer, parfois plus souvent qu’encadrer, conseiller ou sécuriser.

Il était une fois #OpSyria

Tout n’a pas commencé, toutefois, par une simple pression sur un bouton. C’est l’opacité du régime syrien qui a conduit le groupe Telecomix à s’intéresser au pays :

De manière générale, on ne savait pas ce qu’il se passait en Syrie. Le peu d’images qui filtraient nous apprenaient que ce qui s’y passait était beaucoup plus grave qu’en Egypte. Aujourd’hui, on est 10 à assurer le support technique de tout un pays.

On a commencé avec une vingtaine de volontaires aux USA, en Europe, dans le monde arabe” se souvient KheOps. L’idée de départ était de fournir une sorte de boite à outils pour permettre aux révolutionnaires syriens d’améliorer leur anonymat et leur sécurité en ligne. Il fallait écrire, en anglais, d’abord. Réécrire, traduire en arabe, créer les pages, se heurter aux problèmes de ponctuation en arabe, de copier-coller qui parfois ne fonctionnent pas comme escompté… Et bien entendu, le travail technique. Près d’un mois a été nécessaire à une dizaine de personnes pour réaliser ce qui s’est affiché sur les écrans syriens.

Dans la nuit du 11 au 12 août dernier, partent 6000 emails. Destination ? La Syrie. Consignes de sécurité, informations sur le monitoring d’État et bien entendu présentation du groupe Telecomix. Le message, que s’approprient les Syriens, se retrouve très vite sur le groupe Facebook « officiel » de la révolution, des premiers contacts sont établis.

Maintenant, je suis en sécurité grâce à eux. C’est en voyant ce message que je suis allé sur l’IRC. La première fois, ils m’ont tous accueilli et guidé. J’ai beaucoup appris sur la manière dont le gouvernement espionne mes connexions. Je fais confiance à toute cette équipe. Ce sont des personnes spéciales avec un haut degré d’humanité et de responsabilité. Je suis aussi anonyme en ligne, j’ai moins peur de me connecter.

Muhammad, Syrien, n’est pas le seul. Ses nouveaux amis anonymes du web lui donnent aussi des conseils sur l’utilisation de son téléphone, sur les écoutes, des pratiques simples à adopter au quotidien.

Le message qui s’affiche quand on se connecte sur le serveur IRC mis en place par le collectif est explicite : “Public channel: no names, places, personal info” (espace public : pas de noms, pas de lieux, pas de données personnelles). On y croise des hackers, des arabophones venus donner un coup de main. Ils aident aujourd’hui les Syriens à échanger des informations entre eux, faire sortir des images et vidéos du pays, le tout de manière sécurisée.… Sous cette façade se cache un travail titanesque de part et d’autres du mur de la censure.

Aujourd’hui, le groupe d’activistes, rassemblés sous la bannière Telecomix, a pu rentrer en contact avec quelques dizaines de personnes. Méfiant, KheOps prévient : “Rien n’est jamais totalement sûr. On joue au chat et à la souris.” Alors ils sécurisent sans cesse, contournent, accueillent et rassurent sur l’IRC. Tout est fait de manière collective, ce qui semble parfois le surprendre : “On retrouve des gens qui ne se connaissaient pas, de cultures différentes qui travaillent ensemble autour d’un objectif commun, d’un idéal partagé.” Et des vocations naissent. Muhammad sera “journaliste pour parler de la reconstruction du pays” ou… hacker :

Aujourd’hui, j’utilise un email qu’ils ont créé pour moi, ils m’aident à publier des vidéos sur Internet, et surtout ils m’ont donné accès à un espace pour que je puisse y stocker mes données et qu’elles ne restent pas sur mon ordinateur. J’enseigne à mon tour ces techniques à mes amis, je leur ai gravé des CD avec les programmes utiles.

L’inverse est-il possible ? KheOps aurait-il un pied en Syrie ? “Cela fait plus de deux mois que je suis sur l’opération et avec tout ce que je lis, avec les gens avec qui je rentre en contact, avec les connaissances que ça nous apporte… J’ai parfois l’impression d’y être.” L’impression, seulement. Muhammad, que nous avons réussi à joindre, parle de sa ville, dans le centre du pays : “Le calme avant la tempête. Elle est pleine de Shabbiya (ndlr : miliciens proches du régime), on les voit partout. Certains bureaux où j’ai travaillé ont rouvert mais nous ne sommes pas dupes. Une grande campagne d’arrestation d’activistes est en cours.” Un des meilleurs amis de Muhammad a été arrêté le 31 août dernier. Il aurait dû rester, selon ses dires, une semaine en prison “comme tout le monde. Mardi, il n’était toujours pas réapparu.

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